Marcher sur la banquise, pourquoi pas ?
Notre agent de voyage habituel connaissant notre tropisme sans faille pour le Nord du Canada, cherchait quels étaient donc les terrritoires dans lesquels nous n'avions pas encore crapahuté.
Nous ne souhaitions pas faire le raid Est-Ouest en traversant la grande plaine infinie; pourquoi alors ne pas aller encore plus au Nord, mais cette fois-ci le Nord Est; et c'est ainsi que le Nunavut s'impose à nous, dans un grand projet, Nord Est d'abord, puis Nord Ouest dans la foulée.
Le Nunavut, "c'est où exactement" ???
Plutôt que de nous vanter la possibilité de voir de la banquise d'été, et des ours polaires...notre voyagiste nous propose d'aller à la rencontre des peuples autocthones!!, les Inuit; nous qui cotoyons la foule toute l'année, nous préférions ne voir quasiment personne pendant nos vacances. C'est donc avec une petite réticence que nous avons dit oui pour cette aventure inédite.
Mais comment y aller ? rien de plus simple: Paris-Ottawa avec la compagnie d'aviation Air Canada, puis des billets réservés sur des compagnies locales comme Firstair par exemple, gérée par les Inuit eux mêmes.
Ainsi nous voilà partis encore en mi-juillet pour nos vacances expéditions dans des contrées lointaines et en général plutôt inconnues..Déjà les panneaux à l'aéroport d'OTTAWA ont des faux airs d'exotisme nous proposant d'aller là où aucune personne censée ne se rend, (sauf à être originaire de ces contrées): Iqualuit, Quikquiktarjuak, Pond inlet, et plein d'autres noms à la consonnance étrange.
Pour nous c'est encore simple, après une nuit réparatrice à Ottawa, et une incursion au Musée canadien des civilisations de Gatineau, toute proche d'Ottawa (à ne pas rater, on comprend ainsi la diversité des peuples premiers qui peuplaient le Canada, avant que Jacques Cartier ouvre la voie aux occidentaux, de ce grand, très grand pays). Dès le lendemain matin, nous prenons une ligne intérieure pour nous rendre à IQALUIT la capitale du NUNAVUT.
Nous survolons les faubourgs d'Ottawa, puis la végétation prend le dessus, et les buildings disparaissant, ce sont de nombreuses tourbières qui font l'ordinaire de ce paysage, plus tard c'est plus de lacs, et de moins en moins d'arbres. Après le survol de la baie de Frobisher, nous plongeons sur Iqualuit: nous sommes attendus dans ce petit aéroport, à un seul tapis de réception de bagages, par de nombreuses sellettes où chaque région de cet Arctique à découvrir, vante les mérites et les créations de chacun: les sculpteurs de la région du Dorset, les chasseurs émérites, les brodeuses, les différents instruments de pêche et de chasse traditionnels et les spécialités régionales; l'ours blanc est présent, de même que le phoque, pilier de cette civilisation.
Notre réceptive nous attend, le soleil et la chaleur nous font un accueil arctique atypique, qui pourrait donner à penser que le réchauffement climatique est tout sauf une vue de l'esprit. Elle nous conduit dans sa maison flambant neuve à flanc de côteau, nous dresse un portrait explicatif de l'effervescence de la capitale du Nunavut, et nous invite à nous relaxer et nous restaurer.
Nous souhaitons visiter le parc territorial Sylvia Grinnell qui semblait être, vu de l'autre côté de l'Atlantique, l'attraction principale de ce bout de terre; elle nous y conduit de bonne grâce, et nous laisse le soin de rentrer plus tard par nos propres moyens.
On s'extasie alors sur les fleurettes arctiques et sur la splendide Baie de Frobisher, qui brille de tous ces feux sous un "chaud" soleil de Juillet.
Vous souhaitez connaître l'aspect d'Iqualuit l'hiver, car comme disait le chanteur poète québéquois Gilles Vigneault, mon pays c'est l'hiver, allez donc faire un tour sur radio-Canada, les visages du Nord, lumière sur Iqaluit.
En fait on est très impatient de la suite, de ce lendemain arctique dont on rêve depuis quelques mois.
Départ donc tôt le matin pour Pangnirgtung puis Qikiqtarjuak.
Voici quelques thèmes qui vous donnerons envie de suivre nos traces:
- IQALUIT, capitale du NUNAVUT, pas de route goudronnée
- Village Inuit: Qikiqtarjuak, la vie dans les villages, l'habitat, les habitants, les coutumes
- Cabotage par beau temps dans le détroit de Davis à Quikquiktarjuak et l'île de Broughton: la ronde autour des icebergs
- Chasse aux phoques avec Billy, la culture du phoque est bien ancrée, de la vie aux Kamik (bottes)
- Soleil de Minuit ...
- Aventures insolites dans une cabane du bout du monde, ou comment on peut sauver une vie et se mettre soi-même en danger : quelle aventure!! french doctors au bout du monde
- Cabotage à l'entrée du parc Auyuittuq, la solitude entre roches et eau
- Découverte d'un cimetière marin
- Camp de toile aux abords du glacier au fond de Coronation Fjord et balade à minuit comme en plein jour fusil au poing
- Rencontre attendue et inespérée avec l'ours blanc, lequel est le plus appeuré ?
- Pangnirgtung: cabotage par temps incertain dans le fjord de Cumberland Sound: la ronde des phoques
IQALUIT (veut dire "les poissons" en Inuktitut, langue des Inuit), capitale du NUNAVUT, pas de route goudronnée...
La capitale du Nunavut, (environ 7200 habitants en 2008) en plein été est grouillante de vie, ainsi vont et viennent, voitures, 4x4, quads,et camions, parmi une population elle même très métissée, on rencontre des Inuit pur jus, des canadiens très canadiens, des métis et de très rares touristes, plutôt quelques aventuriers, prêts à travailler pour un jour ou plus, tels les journaliers d'autrefois dans nos campagnes.
La poussière est partout en cette belle journée d'été, car bien sûr aucune des routes n'est goudronnée, car ici en Arctique la terre est instable, le pergélisol rend le sol "mou" et "meuble", mais l'été, ce n'est plus la glace et la neige (ville englacée 8 mois de l'année) mais de la poussière qui tourbillonne sous les roues de ces véhicules en mouvement. La chaleur permet à de nombreux moustiques de venir nous attaquer, et nous avons pris la précaution d'acheter des combianisons de protection en cotion tout en un pour se protéger de ce minuscule prédateur. Du reste vous pouvez rencontrer les francophones du Nunavut (association des francophones du Nunavut) à Iqualuit qui forment une communauté active et chaleureuse et chez qui nous nous sommes approvisionnés et qui avaient fait le lien avec nos guides dans les deux villages que nous allions visiter.
C'est le protoype d'une ville en construction, où tout se développe à marche forcée, il y a un hôpital, des écoles, le siège de l'Assemblée Législative du Nunavut, des restaurants et quelques hôtels. les bâtiments en durs cotoient des hangars, des bâtisses de type préfabriquées, la zone industrielle est imbriquée dans la zone d'habitation donnant un sentiment de grand désordre.
Vous pouvez aller visiter un excellent musée situé en bas de la ville, Nunatta Sunakkutaangit Museum, où l'on peut s'imprégner de ce qui fait "l'inuitcité arctique": le froid, l'isolement, la survie donc. Une véritable poésie se dégage au travers des sculptures réalisées avec les matériaux in situ: fragments d'os, ivoire prélevée sur les défenses des morses, pierre stéarite sculptée, représentant l'univers de cet extrême bout de terre: les danses, les rituels, les animaux où l'ours est omniprésent. Vous découvrirez les animaux qui peuplent ces régions: les phoques, les morses, les rennes, le renard, l'ours polaire; un peu plus loin vous apprécierez la beauté des vêtements de cérémonoe et ceux du quotidien où il fallait autrefois se prémunir du froid et des tempêtes, ainsi que de belles photos montrant les Inuit avant leur sédentarisation.
Vous pouvez avoir la chance de participer à des festivités, où même très tard dans la soirée, une atmosphère festive, vous permettra d'assister à des danses ou tradition et modernité se mêlent, et où les balades écossaises rapellent la grande époque des baleiniers, ces derniers venus se mêler à la population locale et laisser leurs empreintes jusque dans les gènes de leurs descendants...
Villages Inuit: Pangnirtung, Qikiqtarjuaq, la vie dans les villages, l'habitat, les habitants, et les coutumes
Premier choc: l'avion dans lequel nous montons n'a que 6 places passagers, et tout l'avant est transformé en cargo, rempli à raz bord pour aller distribuer nourriture, médicaments, et matériels divers, pour Pangnirgtung et Quikquiktarjuak. Nous sommes 6 au départ d'Iqualuit, avec une hotesse de bord. Survol à la fois marin et terrestre, où une terre brûnatre alterne avec de petits lacs noirâtres dans la toudra, puis enfin de petits et de plus grands glaçons annoncent l'arrivée à Pangnirtung au fond d'un magnifique fjord. L'aéroport est minuscule, nous descendons quelques minutes, avant de décoller à nouveau.
Un premier grand moment de solitude, nous sommes deux avec l'hôtesse pour arriver à destination: mais quel spectacle grandiose que le survol de Penny Ice Cap, où se succèdent glaciers descendants de la calotte, et fjords impressionnants sous un ciel bleu azur!
Qikiqtarjuaq!!, le village, ou l'accueil innatendu
Le bout du monde pour deux français en mal d'aventures, à l'arrivée agrippés au grillage entourant l'aéroport, une pléiade d'enfants sont aux premières loges, enfin pour eux il se passe quelque chose, qui regarde qui? notre guide n'est pas là; une petite dame agée, flanquée d'un enfant à la moue boudeuse, arrive cahin-caha, après que tout l'avion cargo ait été déchargé et que nos sacs de voyages attendaient... isolés sur le tarmak. Par geste nous comprenons qu'il faut la suivre, nous ne parlons pas INUKTITUT et l'Anglais est pour elle un dialecte incompréhensible!
En Arctique dans des territoires très peu peuplés, au sein de ces micro-villages se loger est un vrai casse tête, point de véritable hôtel, et les "chambres d'hôte" restent souvent rudimentaires.
Pour nous, point de chambre réservée au seul "hôtel" du village (comme prévu dans notre descriptif d'avant, avant le départ, avant l'arrivée à Ottawa, avant...) dans ce bâtiment préfabriqué où sont logés et nourris les ouvriers qui travaillent sur le seul chantier du village. Le repas d'accueil pris "en famille" se résuma à une viande de caribou ? ou de phoque? bouilli d'un goût douteux pendant que nos hôtes, père et mère de notre guide, toujours absent, mangeaient debout dans la partie cuisine de leur living en nous tournant le dos! quel accueil!! la mère de Billy se lamentait presque sous forme de psalmodie: ah Billy, Billy ... en nous montrant par la fenêtre l'horizon marin vide de la moindre embarcation, où seuls quelques icebergs résidents occupaient ce grand espace.. ainsi ce fût notre deuxième moment de grande solitude! suivi assez rapidement d'un troisième: vous l'avez compris en fait nous dormions chez les parents de notre guide (chambre exigüe, draps à peine propres, tringle de penderie occupée par de nombreux vêtements, nos deux sacs de voyage empilés derrière la porte que du coup nous avions grand mal à ouvrir). A peine couchés, on nous extirpe de notre lit car, tel un mot de passe ou une incantation chamanique, la Mère nous dit: Billy, Billy, ces mots accompagnés de grands gestes, nous indiquent de la suivre très vite; on enfile à la hâte nos vêtements, et nous nous rendons au port: là, après quelques minutes d'attente, point de Billy: where is Billy? elle lève les bras aux cieux et les psalmodies reprennent et nous retournons nous coucher, " en plein jour" à presque minuit!
Le lendemain il faut rapidement aviser: Billy se fait toujours attendre, les téléphones portables sont inutilisables, s'agit il d'un attrape nigaud, sommes-nous irrémédiablement bloqués dans ce village? tout alors devient pour nous, non pas exotique, mais presque hostile: que font ces gens à virevolter avec des raquettes de volant sans jouer ensemble?, que font ces jeunes accoudés à la rembarde du seul supermarché?, qui sont ces femmes déambulant en costume traditionnel, enfant porté dans le dos?, pourquoi roulent-ils à fond de train en quad sur ces coutrtes routes poussièreuses qui mènent nul part?, y a t il un lieu administratif "refuge" pour nous?, qui doit-on prévenir et comment le faire ?, la vue d'un drapeau canadien et du Nunavut au fronton d'un bâtiment officiel (toujours d'allure préfabriquée) sont rassurants. A l'intérieur un officier canadien, arrivés lui même de fraîche date dans ce village nous rassure quelque peu, il semble que l'exactitude n'est pas une vertu cardinale ici; il nous aide à joindre notre contact à l'association des francophones du Nunavut à Iqualuit et prendre copie de nos passeports, de nos documents de voyage, ainsi que des numéros de téléphone de nos enfants en France au cas où...
Nous décidons de découvrir seuls le village et les alentours, toujours un peu inquiets car dans tous les récits, il faut imaginer rencontrer par hasard Nanuq, l'ours polaire!!
L'anse où est bâtie Quiquiktarjuaq est un écrin: mer bleue marine, icebergs peu nombreux cette année là, mais d'une blancheur étincelante et assez majestueux, et puis autant l'avouer c'étaient les premiers! Pas d'arbre, pas de route goudronnée, des collines rases, des mirages sur la ligne d'horizon, donnant le sentiment de deux fois plus de glace encore présente et qui semblent nous échapper selon l'heure du jour.
Le village, en réalité on pourrait dire les villages, voire même tous les villages Inuit, car ils se ressemblent tous, de l'est à l'ouest, du Groënland à l'ensemble des territoires arctiques canadiens.
Comme ce doit être charmant l'hiver, car la neige recouvre tout, l'englacement efface les frontières entre terre ferme et océan gelé, la nuit polaire s'installe après les feux follets mystérieux des aurores boréales. mais qu'en est-il lorsque le soleil de minuit met à nu tout le village?C'est le vrai foutoir!! les maisons façon ALGECO, parsemment cette lande au bord de la mer de Baffin (expansion de la mer du Labrador), toutes différentes et tellement ressemblantes, les jerricane de gaz à l'extérieur, elles sont sur pilotis, ainsi s'y glissent au dessous des chiens assoupis, et un caravensérail d'objets divers utiles ou inutiles, éventuellemnt abandonnés; puis tout autour de chaque habitation stationne à la façon d'un conte suréaliste, un bateau en cale sèche, un traineau en bois, un skidoo, un quad, et parfois flambant neuf devant la porte d'entrée, un magnifique pick up qui roulera sur les quatre kilmètres de route de ce vaste territoire!! Le linge peut flotter, les peaux de phoques sont tendues sur leurs arceaux, les bois de caribou, emblême d'un grand chasseur, se dressent au fronton de la porte d'entrée. Les vélos des enfants sont abandonnés çà et là.
La vie locale donne l'impression de s'organiser autour du supermarché, lieu d'achat de ces denrées occidentales contaminant ainsi ces Inuits, comme une perfusion peut apporter guérison ou mort fulgurante. Ils fument, ils boivent (çà c'est "légal"), le canabis lui peut laisser flotter son odeur caractéristique, mais qu'à celà ne tienne, les gardiens des territoires du Nord sont sédentarisés, subventionnés et bien ancrés à la terre de leurs ancêtres, mais pour beaucoup ayant perdu le sens même de leur culture initale, empilant ainsi les joies de la consommation, et quelques traditions où la chasse au phoque, la traque de l'ours, les suicides et les morts violentes restent encore un peu leur quotidien.
Là bas ils sont jeunes, très jeunes, les enfants sortent de partout, sont assez familiers avec nous, tout en ayant cette crainte attractive de l'inconnu. Tant mieux pour vous car ils adorent être pris en photo ou en vidéo et leur plus grand plaisir c'est ensuite de voir le résultat dans l'immédiateté à laquelle nous sommes maintenant habitués. Chaque femme a 3 ou 4 enfants, rien de choquant qu'il s'agisse de 4 pères différents, tout ceci se faisant en famille puisqu'ici on est tous cousins et que le cercle de connaissances est restraint, environ 550 âmes dans le village et des communications entre communautés rares, diificiles, occasionnelles, on se rend essentiellement en avion à Iqualuit et Pang, pour les autres villages on se parle par CB interposée, c'est un peu difficile pour de vrais rapprochements!! Ici on adopte beaucoup; c'est dans la tradition, probablement que les notions de parentalité sont au sens large, la famille ayant des contours moins définis que pour nous. Un suicide, on adopte l'enfant de sa nièce, une mort accidentelle on se partage les enfants dans différents foyers. La communauté se retrouve autour de l'Eglise, petit clocher visible mais porte fermée en dehors des offices; bref il y a aussi la poste, la GRC et le poste de traite des peaux, et l'inns Tagaluk, et une école...
Au delà la mer, cette mer blanche de fin octobre à fin avril et si bleue aujourd'hui, nous allons pouvoir naviguer car Billy est enfin rentré d'un convoyage de touristes au Parc Auyuittuq.
Séance d'habillage avant de monter dans le bateau: combinaisons étanches orange, par dessus nos vêtement, où nous ressemblons vite aux publicités pour les pneus Michelin! Billy très professionnel emmène avec lui un jerrican de réserve et surtout plusieurs fusils, par contre il doit être immunisé contre le froid et les submersions intempestives, car il ne met ni combinaison ni gilet de sauvetage.
Cabotage par beau temps dans le détroit de Davis à Quikquiktarjuak et l'île de Broughton: la ronde autour des icebergs, et le cabotage aventureux à la cabane de Billy
On découvre à bord d'un bateau à un seul moteur mais très puissant, un gros Yamaha, l'Arctique et sa banquise, y accoster et y déjeuner, tout un programme! Une mise en jambe autour des icebergs résidents: ils sont là comme dans un cimetière (vous apprendrez dans un autre carnet de voyages que ces cimetières existent!), ils ne dérivent plus, eux aussi ils se sont sédentarisés comme les Inuits, l'hiver ils sont pris dans les glaces, font la joie des villageois qui les escaladent et l'été celle des touristes qui les admirent et les photographient sous tous les angles. Allons plus loin marcher sur la banquise: on accoste, le bateau est arrimé, une ancre est plantée dans la glace, et nous sommes invités à mettre pied sur cette eau gelée, solide ou pas solide? en fait c'est très variable mais grâce à notre guide, l'endroit est sûr. Nous prenons confiance et déambulons quelques instants: photos, films, photos, films, encore et encore, souvenirs magiques d'un instant d'éternité: de la pureté, pas de pollution, du silence entrecoupé du clapotis de l'eau sur la coque du bateau, et le cliquetis incessant du déclenchement des appareils photos, pourtant celà ne devrait pas, il suffit de suivre les conseils photos...lien à faire. Le repas se fait attendre, Billy n'arrive pas à allumer son réchaud, l'arctic char lui même congelé nécessite un peu de cuisson. Changement de programme, on quitte à regret notre nouvelle terre ferme et piqueniquons à quelques encablures sur un promontoire où avec trois brindilles, deux bouts de bois frottés l'un contre l'autre, on s'initie aux joies d'un vrai camp Inuit!! que le poisson grillé a un goût délicieux, et que le thé arctique fait de quelques feuilles microscopiques a un parfum extraordinaire: revenir à l'essentiel voilà un sain parcourt initiatique, tout en contemplant des paysages somptueux, nature aux mille reflets dans une eau calme, translucide, où l'original et la copie se confondent.
Aucune journée ne ressemble à la suivante, mais au sein de cette diversité des paramètres d'une grande constance lient intimement ce lieu reculé:à l'entrée du Parc Auyuittuq, cabotage dans le fjord de Pangnirgtung, puis installation dans la cabane d'été sous le soleil de minuit. On a déjà l'habitude de mettre nos combinaisons oranges, on embarque avec deux jeunes étudiants canadiens, l'objectif est d'atteindre l'entrée nord du parc Auyuittuq, où ils seront déposés pour accomplir le grand périple à l'intérieur du parc et rejoindre en plusieurs jours Pang (voir ici la faisabilité).Nous nous contentons d'admirer les paysages abruptes, majestueux, faits de roches de couleurs beiges à ocre, avec des parois verticales sans végétation apparente , avec des oiseaux, par milliers essentiellement des goélands, et quelques fulmars, et de visiter la cabane de survie à l'entrée du Parc qui contient un livre de bord, des allumettes, (une balise de détresse), quelques boites de conserve, et un matériel pour se chauffer et attendre les secours.
Nous abandonnons nos aventureux jeunes compagnons et avec notre guide, sa femme et leur chien nous poursuivons notre route. Le jour (ou la nuit), s'étire, cette dilatation du temps entraine une exaltation véritablement perceptible. Enfin vers une heure du matin, la cabane faite de quatre planches de bois est en vue. Posée au mileu de nulle part, pourquoi donc là plutôt qu'ailleurs: c'est la cabane aux mille histoires, celle entre autre de cinéastes français venus tourner en avril dernier, et qui furent surpris par quatre ours polaires aventureux, car au réveil, à chaque issue une tête blanche, un regard noir, et des coups de pattes ont été leur quotidien... mais nous, ah nous, nous avons le chien, un véritable guetteur, un renifleur d'ours, et aussi trois fusils.. après un drôle de repas faits de tartines, on s'endort à même le sol (de la cabane) séparés de nos hôtes par un pudique drap tendu dans le milieu de la pièce, on rêve, on cauchemarde, oserons-nous nous lever et aller dehors pour de simples besoins naturels? Allez faire un tour dans l'Arctique sauvage, devenez de vrais aventuriers !
Mais à Billy (Nunavut Experience Outfitting) rien d'impossible, après de véritables émotions liées à une aventure humaine, une balade dans les eaux sombres du soir ne nous laissait pas présager que sa culture d'origine resurgirait: simple formalité, courtoisie à notre égard, peur de nous choquer, il nous demande l'autorisation de chasser, de rapporter à sa mère, une peau de phoque qu'elle tannera et qui se transformera au cours des longues soirées d'hiver en de magnifiques bottes fourrées, les kamiks traditionnels, pendant que la viande, elle, aura été congelée (modernité oblige) et deviendra un ragoût. Mais auparavant, la si mignonne tête du phoque, ce vif argent des mers, qui à peine aperçu disparait au regard en plongeant dans les eaux froides, que va-t-elle devenir? Un coup de feu claque, précis, disons "chirurgical", en tout cas témoin d'une longue pratique: du sang, beaucoup de sang rouge transforme d'un coup, cet univers aux tonalités froides en un univers où le rouge cette couleur primaire par excellence est le synonime de tuerie !!! c'est fait en un instant, un clin d'oeil, pas le temps, mais au fait le temps de quoi ? du regret de cet avant, de la seconde qui précède... Après, c'est le spectacle du dépeçage, car comme nous l'a si bien expliqué Billy, et bien d'autres, évitons toute sensiblerie, dans ce pays si hostile à l'homme, les Inuits c'est la civilisation du phoque, sans lequel les cohortes générationnelles d'Inuits n'auraient pas survécu. Assistons au spectacle! une vraie leçon d'anatomie, car le phoque est un mammifère, tous les organes sont reconnaissables. Nous n'avons pas gouté au foie encore presque palpitant de l'animal, mais avons compris que cette expérience étaient un raccourci de survie, et surtout une leçon de vie et pas une scène cruelle. Le prélèvement est aussi mesuré que celui de l'ours polaire, aucune intention de folie meurtrière, juste de quoi survive, se nourrir et se vêtitr: la peau est transformée, la graisse bien le plus précieux pour toutes les calories qu'elle contient sera mangée au fil des saisons glacées, les viscères sont immédiatement rejetés à la mer venant ainsi nourrir une flopée d'autres êtres vivants invisibles certes mais indispensables dans l'écho-systême. Cette peau vidée, laissée flottante dans l'eau, semble redonner vie à cet animal marin dont on n'oserait plus s'approcher de peur de le réveiller.
Un coup de feu claque, précis, presque "chirurgical", en tout cas témoin d'une longue pratique : du sang, beaucoup de sang rouge transforme d'un coup, cet univers aux tonalités froides en un univers où le rouge cette couleur primaire par excellence est le synonyme de tuerie !!! C'est fait en un instant, un clin d'oeil, pas le temps, mais au fait le temps de quoi ? Du regret de cet avant, de la seconde qui précède...
Deux jours de campement aux abords d'un immense fjord sont l'occasion de visites de deux cimetières marins, où gisent des restes de squelettes de morses: simple échouage ou tuerie organisée pour vendre l'ivoire, événements récents ou témoins d'une histoire passée? La lumière, aussi intense que sur notre Côte d'azur, a rendu ce spectacle non pas dramatique mais plutôt suréaliste. Longer d'immenses falaises en cotoyant de nombreux oiseaux piaillant et nichant sur ces roches abruptes sont un spectacle pour les yeux. Le but de ce "camping" est d'atteindre Coronation Fjord, de longer le glacier long de deux kilomètres, d'en saisir toute sa grandeur. Il prend des tonalités bleues "glacier" mais aussi des teintes sombres, par la présence de roches moulinées par les moraines. Que notre embarcation apparait frêle, comme ces petites coques de noix surnageant dans un ruisseau! Pas de vêlage spectaculaire, mais on voit plusieurs torrents sous glaciers, faisant un véritable rabot souterrain semblant fragiliser les bases mêmes du glacier. L'installation du camp de toile au bord de l'eau prit quelques temps, puis vint un repas arctique préparé dans l'instant par Daisy, la fidèle épouse de Billy; nous terminons la soirée par une balade nocturne, le long d'un terrain escarpé, permettant de s'élever un peu, en pleine clarté aux environs de minuit, avec chien, guide et fusil, admirant le fjord et la végétation qui peine à grandir dans cet univers pour 80% du temps glacé.
Le lendemain le cabotage astucieux de Billy nous entraine encore une fois aux confins d'une banquise morcelée mais active qui s'ouvre et se ferme au gré de ses envies; de magnifiques vols d'oiseaux, d'oies du Canada pour la plupart sont l'occasion d'une belle séance de photos. Puis, en un instant, Daisy s'agite car le chien aboie de plus belle, et ses jumelles toujours rivées sur ses yeux, crie Nanuq, Nanuq...où, mais où ? Vite appareils photos sortis, zooms au maximum de leur focale, caméra au poing, nous scrutons dans la direction de son doigt pointé. Il apparait enfin, puissant, un peu appeuré, probablement plus surpris que nous. Il nage comme un forcené, prend un élan formidable et d'une poussée s'extirpe de l'eau et gravit la montagne très escarpée qui est sa seule échapatoire. Pour nous quelques minutes de temps suspendu... un coup d'accélérateur pour essayer de le revoir de l'autre côté de l'escarpement, il est à nouveau à l'eau, mais il reprend sa course, dans l'eau et sur terre, reste pour nous le souvenir de cette rencontre.
Villages Inuit 2: Pangnirtung, une autre approche
Après notre immersion à Qik (vous l'avez compris, nous sommes un peu plus calés sur les coutumes au sein des villages Inuits). Nouvelle aventure-découverte à Pang (ici les villages ne se nomment qu'en abrégé), le guide n'est pas là, à notre descente d'avion (un grand classique!), le temps est plus arctique, maussade et un brin pluvieux. Laissant nos sacs de voyage en consigne, ainsi allégés nous cherchons grâce à notre "voucher" (bon d'échange) notre logeuse. Pour se faire nous errons un peu... pas de nom de rue, les autochtones fortement majoritaires n'ont pas un anglais très "fluent", et donc de maisons en rues, de montées en descentes, dans ce joyeux cafarnaüm, nous finissons par découvrir la maison de cette Inuit, bonne commerçante à l'accueil chaleureux de circonstance, et au demeurant excellente cuisinière (comme quoi, on peut aussi bien manger en Arctique). On décide de visiter le village en détail, tels des anthropologistes (?), en tout cas comme des touristes passionnés par cette civilisation hybride à mi-chemin entre une tradition rude et glacée et une frénésie de consommation, preuve s'il en est pour eux qu'ils ont tourné la page, passant d'autochtones à véritable canadiens "assistés", gardiens du temple, gardien de ces lieux reculés où les enjeux vont au delà d'une préservation de la nature, enjeux financiers des richesses du sous sol, enjeux de développelement et de commerce grâce aux conséquences du réchauffement climatique apparent (?) !!! ah consommer, toujours consommer plus, et faire croire au bonheur procuré par cette vie d'occidentaux, (que nous aimons fuir par intermittence comme beaucoup d'entre vous). Mais là, pardon, c'est une digression, mais ces réflexions sont venues à nous comme une véritable évidence lors de nos visites.
Le village : niché au fond du Fjord de Pangnirtung, porte d'entrée et/ou de sortie du Parc Auyuittuq très sauvage, a une activité de pêche non négligeable, nous avons bien sûr dès le lendemain visité l'usine de pêcherie. Nous retrouvons, les quad, les pick up, les bateaux de petite taille, flanqués de puissants moteurs, majoritairement Yamaha. Quelques commerces, un peu d'artisanat, avec des gravures des peintures Inuit, un Northern, Le Super Marché, point de ralliement obligatoire avec les jeunes en "stand by"un restaurant du style cantine, mais quand il pleut c'est toujours sympa de se restaurer au chaud et de continuer à regarder vivre "les autres".
Magnifique musée, où nous avons découvert de nombreux documents authentiques en particulier des "press books" de photographies d'avant l'extinction de ces différences culturelles,quelques sculptures intéressantes et de nombreux panneaux explicatifs (en trois langues, Parc National oblige : anglais, français et Inuktitut) avec des renseignements précieux pour ceux qui vont faire un "trek" dans le Parc Auyuittuq.
La ronde des phoques, dans le Cumberland fjord :
Ce n'est pas notre guide qui vient nous chercher le lendemain matin, vous l'avez compris, c'est SON COUSIN, mais ils le sont tous !!! Qu'à celà ne tienne, nous voulons aller vers le large là où les icebergs paraissent volumineux,avec des déclinaisons de bleus à faire palir de jalousie tous les ciel. Nous on cherche l'ours, puisque nous en avons vu un à Qik pourquoi pas encore un autre ?
Eh bien il était certainement pas très loin, mais non payé par le syndicat d'initiative, nous n'avons vu que sa nourriture préférée sur pied, mais pas le moindre polar bear! Mais quel bonheur, de voir des dizaines et des dizaines de phoques (peut être que nous on a été influencé dans note prime jeunesse par BB, Brigitte Bardot, et ses plaidoyers pour l'arrêt des massacres des bébés phoques), qui font le yo-yo, tête hors de l'eau, tête sous l'eau. Nous essayons d'en photographier un. Clic, regard sur l'écran de contrôle, pas de chance, seulement des ronds dans l'eau. Finalemenr, c'est tant mieux, car si l'ours va à la pêche, il lui arrive très souvent la même mésaventure !
Un phoque partiellement dépecé, accompagné d'un goéland avide de se nourrir témoigne de l'activité du prédateur principal : la graisse a été entièrement dévorée par l'ours polaire, afin de se faire "du gras pour l'hiver", délaissant à d'autres la viande qui commence à noircir.
La visite de la pêcherie :
Toujours curieux et intéressés, nous sommes allés visiter la pêcherie: moderne et très efficace, mais en cette saison il n'y a pas d'activité; le gardien est cependant affable et nous explique en détail leurs différentes activités, de pêche, d'envoi dans des villes plus importantes et de conserverie. Un nom étaient pour eux un synonyme de la France: Jacque Chirac, là, au fond de ce fjord! car notre ancien Président quand il était en exercice, avait été amené par le Premier Ministre du Canada pour une partie de pêche!!!
Mais comment rentrer? en fait, pour nous, continuer notre périple Arctique. Il faut reprendre notre avion-cargo, pour Iqaluit, mais les conditions météo sont toutes autres, vent, pluie, brouillard: nous sommes confrontés à ces impondérables si habituels sous ces lattitudes, il faut attendre... que l'avion venant d'Iqaluit se pose, qu'il essaie de rejoindre Qik, puis... de...revenir... en espérant qu'alors on puisse à notre tour décoller...merci pour les conseils avisés de notre voyagiste, d'avoir prévu une journée "tampon" à Iqaluit!!!
Ainsi s'achève le périple en solo dans cette terre de Baffin, entre culture traditionnelle et ébauche de modernité, au service d'un tourisme embryonnaire, des guides déjà compétents et un parfum d'aventure.